Activer le désir et l’engagement des équipes : la recette de la Maison Dandoy avec Alexandre Helson par Sarah Ladam
- Anaïs Baumgarten
- 29 août
- 24 min de lecture
Cet article est le transcript et les ressources de l'épisode 58 du podcast Slow Marketing. 🎧 Voici le lien pour écouter l'épisode ! 📮Abonne-toi à la Newsletter pour ne rien louper des prochains épisodes !
“Quand le cadre est clair et que l'ont est aligné, il n’y a plus de freins. Ceux qui veulent nous suivre, nous suivent.”
Dans cet épisode de notre mini-série Slow Marketing sur le désir de changer, Sarah Ladam discute avec Alexandre Helson, co-CEO et directeur marketing de la Maison Dandoy.
À la tête d'une maison familiale bicentenaire, Alexandre et son frère ont engagés l’entreprise dans une trajectoire régénérative, en posant des bases solides : de la clarification d’une vision personnelle à la mise en récit et actions concrètes pour embarquer ses collaborateurs (et ses clients).
🎯 L’objectif de cet épisode ? Explorer comment une maison familiale de plus de 200 ans peut conjuguer tradition et régénération, en partant de la vision intime de son dirigeant jusqu’à l’incarnation concrète en interne et en externe.
💬 Tu découvriras notamment :
- Pourquoi tout part d’une vision personnelle claire du leader (et ce que cela change dans l’adhésion des équipes). 
- Comment traduire cette vision en un cadre partagé (mission, valeurs, comportements) et en faire un manifeste vivant. 
- Le rôle des RH comme gardiens du récit interne, qui rendent la vision tangible et vécue au quotidien. 
- Pourquoi accepter la lenteur et les temps de régénération est essentiel pour viser un impact positif net. 
- Comment la Maison Dandoy veut désormais partager son engagement au-delà du produit : un biscuit bien fait, mais aussi porteur de sens. 
🎧 Un épisode pensé pour les dirigeant·es et communicant·es qui veulent comprendre comment la communication peut devenir un véritable levier d’adhésion des collaborateur·rices — et quels prérequis sont nécessaires pour que cela fonctionne.
Les ressources
- La Doughnuts economy -> https://doughnuteconomics.org/stories/maison-dandoy-doughnut-design-case-study 
- Le principe de robustesse d’Olivier Hamant -> https://www.thinkerview.com/olivier-hamant-survie-dans-le-chaos-la-robustesse-a-lepreuve/ et de livre 
- The future of responsible company -> https://www.patagonia.com/product/the-future-of-the-responsible-company-paperback/BK235.html?dwvar_BK235_color=000 
- Small giant -> http://www.smallgiantsbook.com/about.html 
- The Good Ancestor: How to Think Long Term in a Short-Term World (English Edition) 
Le transcript
Introduction à la transformation chez Maison Dandoy
Quand on parle de transformation en entreprise, on pense souvent à la nécessité de suivre une stratégie, des indicateurs et de contribuer à une vision à long terme. Mais une transformation, aussi ambitieuse soit-elle, ne tient pas sans les humains qui la portent. Un constat auquel je me suis confrontée dans une de mes précédentes entreprises avant de me former pour mieux comprendre ce que veut dire impact environnemental et sociétal. Une réflexion qui m'anime aujourd'hui au quotidien depuis que j'ai décidé de retourner travailler en agence de publicité pour y amener aussi ces questions. Car engager les personnes, et en particulier les collaborateurs dans ce changement, reste l'un des plus grands défis. Pas parce qu'il manque d'informations, mais parce que changer suppose d'adhérer, de ressentir, de dédier autrement.
Dans cet épisode, je propose d'explorer les leviers d'adhésion au sein de l'entreprise, et comment le marketing peut activer un changement qui fait sens sur les gens de l'intérieur. J'ai le plaisir de recevoir Alexandre Helson. Bonjour Alexandre.
Alexandre, tu es co-CEO de la Maison Dandoy, mais aussi son directeur marketing. La Maison Dandoy, c'est une entreprise familiale engagée dans une transition à la fois écologique, sociale et culturelle, portée par une volonté sincère de réconcilier identité forte, entreprise et responsabilité durable. Avec toi Alexandre, on va parler de culture d'entreprise, d'adhésion, de récits et des biais qu'il faut parfois déconstruire pour rendre la transition possible et surtout désirable pour ceux qui la vivent au quotidien. Est-ce que tu peux nous dire deux mots sur ton parcours et ton entreprise ?
Tu as déjà très bien résumé ce que La Maison Dandoy voulait faire. Par rapport à mon parcours, je suis ingénieur de gestion de formation à Solvay. A priori, on n'a pas du tout parlé et abordé ces sujets-là lors de la formation, malheureusement, à l'époque. Après être passé par là, j'ai été dans une agence de digital marketing, ce qui m'a permis de voir un peu l'envers du décor de tout ce monde. du S.E.A, du S.E.O et de la publicité et que, pour être très honnête avec toi, ne m'a pas beaucoup emballé. Au moins, ça m'a permis de comprendre ce qui se passait derrière. Et j'ai rejoint ce projet familial parce que la Maison Dandoy, comme tu le mentionnais, c'est une histoire de famille dans laquelle je suis né, qui a été créée par notre arrière arrière arrière grand-père Jean-Baptiste Dandoy en 1829. Donc on va avoir 200 ans bientôt. Et donc lors de mes études, j'ai eu l'opportunité de pouvoir faire mon mémoire sur la stratégie de développement de cette maison. Et c'est à ce moment-là que j'ai su que je la rejoindrai un jour, je ne savais pas quand encore. Et donc très rapidement, avec cet esprit d'entreprendre que j'avais, je suis rentré dedans. Il y a maintenant une dizaine d'années et commencer là-bas par le rebranding de la maison, le fameux poids doré, etc. et tout le parcours qu'on va essayer d'aborder peut-être rapidement lors de ce podcast maintenant, jusqu'à aujourd'hui. Et donc je co-dirige maintenant avec mon frère depuis maintenant presque quatre ans. Notre papa nous a transmis la 6e génération à la 7e génération il y a quelques années et c'est là que nous avons en tout cas vocalement repositionné l'entreprise vers le monde extérieur.
Les défis et leviers de la transformation
Et donc chez Dandoy, tu viens de le mentionner, vous avez entamé cette transformation profonde. Tu l'as un peu évoqué, mais donc c'est à la fois l'offre, les pratiques, le récit. Qu'est-ce qui, selon toi, a permis à ton équipe de s'engager dans cette transition ? Au départ, évidemment, j'imagine que quand la réflexion est venue, etc. Vous partiez déjà avec un fameux bagage historique, etc. Donc, qu'est-ce qui a fait que ça a été possible, mais aussi qu'elles étaient peut-être les freins invisibles, les croyances ou les habitudes spécifiques qui auraient pu bloquer ce processus, selon toi ?
Ça a commencé par une réflexion d'abord individuelle et profonde de qu'est-ce que je veux faire, pourquoi est-ce que je veux le faire moi, tu vois, et comment... qu'est-ce que j'ai envie de faire de ma vie, simplement, à quoi je... Et une fois que ça c'était très très clair chez moi, j'ai eu l'opportunité de pouvoir voir avec mon frère, de la proposer à la famille, dire en fait ça c'est notre vision de la société, ça c'est nos idéaux, nos croyances, notre vision du monde actuel et de demain. On a l'opportunité en famille, de par notre indépendance, d'essayer de faire coller au maximum cette société à notre volonté. Donc il fallait d'abord convaincre nos parents, c'était la première étape. Pas la plus facile non plus, parce qu'il y a quand même, générationnellement, même si on a baigné dans une famille progressiste, ils n'ont pas été confrontés aux mêmes... enfin la sensibilité écologique en tout cas, sociale ils l'avaient, mais écologique beaucoup moins. Et donc ils nous ont laissé la possibilité de démontrer ça en deux ans. Et c'est à ce moment-là qu'on a commencé à écrire un manifeste. La pierre angulaire de tout ce projet, c'est de repartir de... Tiens, qu'est-ce qui fait Dandoy ? Quelle est sa singularité ? Qu'est-ce qui fait qu'elle est toujours là aujourd'hui ? Comment est-ce qu'on veut l'inscrire pour les 200 prochaines années ? Et on a écrit tout ça. On a écrit à ce manifeste, on a résumé en 10 points qu'on peut retrouver sur le site et que malheureusement on n'a pas le temps de le parcourir, mais qui reparlent vraiment de notre vision du monde et de à quoi et comment la société va le résoudre. Les challenges en tout cas qu'on a identifiés. Et donc pourquoi est-ce qu'elle existe ? Le fameux, pour les marketeurs, j'espère que vous connaissez tous Start With The Why de Simon Sinek, mais je trouve qu'il est tellement important et en fait c'est une question qu'on se pose assez rarement individuellement et même au niveau d'une société. Et donc on a eu le courage à un moment de se poser cette question du pourquoi la Maison Dandoy existe et en fait est-ce que c'est vraiment utile, est-ce que c'est nécessaire, est-ce que c'est avec ça qu'on va résoudre nos problèmes sociaux et environnementaux. Et donc ça a commencé avec ça. Et ça, ça restait d'abord à mon niveau, avec mon niveau d'Antoine. On avait ses pierres angulaires, puis on s'est rendu compte qu'il fallait commencer à rendre ça un peu plus vocable en interne, d'abord. Comment est-ce qu'on fait descendre ça ? J'avais les personnes du bureau qui commençaient à adhérer, on en parlait de plus en plus, on est tous les jours là, on en parle tout le temps, tout le temps, tout le temps. Mais alors nous, la Maison Dandoy, c'est aujourd'hui presque une centaine de personnes qui sont réparties sur le site de notre atelier, qui est à côté des bureaux, mais à qui on n'est pas tous les jours en contact, et aussi maintenant un réseau de 13 boutiques. qui sont aussi en région bruxelloise mais avec qui on n'est pas tous les jours en contact non plus. C'est quand même un peu débile si ça reste qu'à notre niveau et donc on a commencé à devoir extraire de notre tête, à commencer à devoir créer des visuels, créer des slides. Je n'avais pas le temps dans une entreprise en tant qu'entrepreneur de faire des slides et donc là j'ai commencé à faire tout ça. Donc on crée ces slides et on crée un récit interne. Donc je prends plusieurs fois maintenant en interne la parole et commencer à parler de ça. Et puis en fait, on se rend compte que juste parler, c'est déjà très important. Ça commence à vivre, on commence à mettre des mots, on commence à... à expliquer ce fameux pourquoi. Mais de nouveau, ça reste qu'une ou deux fois par an, ça reste au moment des fêtes de fin d'année. On fait quand même pas mal d'événements, mais ça devait descendre encore un niveau et se l'approprier. Et en fait, tout ça, je me rends compte avec le temps que ça prend du temps et que c'est OK. Parce qu'en cours de route, il y a des gens qui commencent à entendre que les maisons Dandoy se positionnent de cette manière-là vers l'extérieur. arrive pour le projet et ça c'est assez génial et donc du coup ces personnes qui arrivent pour le projet parce qu'ils ont compris le pourquoi de la maison mais du coup elles se l'approprient et elles avec leurs propres équipes du coup peuvent descendre à un niveau et le faire vivre de manière beaucoup plus souvent que ce que moi je faisais une fois de temps en temps. Et un des recrutements clés qui manquait en interne par rapport à ça, c'était notre responsable RH des relations humaines et vraiment de la culture de l'interne, la Gabriela, qui est rejoint après avoir écouté un podcast, étonnamment, et qui a dit, mon rôle, c'est d'aller faire percoler tout ça en interne, entre autres. Et donc, on a commencé et elle a amené vraiment cette culture à l'interne de cette co-création et d'amener, par exemple, tu vois, j'avais écrit toute une série de choses sur des principes de leadership quand même et des grands principes de l'entreprise, de comportement et d'humilité, etc. Et après elle a dit, ok, c'est très bien, mais sur base de ça, on va aller construire les valeurs communes de notre collectif. Et donc ça, on a été, par exemple, créer ensemble autour d'un team building, ces mots, pas que de moi en top down. Après, il y a des exemples, j'en ai pas mal et on va, je pense, revenir par la suite. Mais je trouve qu'il y a eu cette prise de conscience de dire, tiens, c'est très bien que ça vive autour de nous. Mais en fait, notre enjeu collectif à tous, en tant que société, même pas que Maison Dandoy, c'est que la majorité commence à s'approprier ces concepts-là. Et donc, il faut ramener une couche beaucoup plus ludique aussi, de simplification. Moi je me rends compte que je commençais à devenir complètement perché dans des concepts, dans des trucs très... à force de rencontrer et d'être dans mes bulles passionnantes, et bien finalement il y avait un risque de perdre aussi. l'entreprise, de perdre les gens qui tous les jours en fait sont encore très très loin de ça et donc voilà c'était un petit peu les freins. Moi j'en voyais, il y avait mes parents mais après en interne, c'est vrai qu'il y a une culture qui est là, qu'il faut accepter, qui avait été mise par nos parents, mais familiale qui n'était pas engagée encore. Il y avait donc des gens très très très orientés sur le produit, les artisans sont des car très peu, en fait, le monde extérieur, ils sont tellement focalisés sur ce qu'ils font qu'ils ont oublié, on parlait, je dis, ça va peut-être faire rire les marketeurs qui nous écoutent, mais le terme client est un mot que nous n'utilisions pas et qu'on commence à utiliser encore, dans notre vocable, très récemment. Et donc là, il y avait vraiment cet enjeu de les emmener dans une société de culture engagée. On avait mis dans le manifeste on veut bousculer le statut qu'on veut créer, une coalition de gens passionnés et engagés. Et un des objectifs, au-delà de la mission qui était de vouloir avoir une entreprise écosystémique qui contribue à la co-création d'un monde plus durable et plus joyeux, pour y parvenir, on a mis un des macro-objectifs qui était de créer des emplois valorisants et qui stimulent l'engagement. Donc je sais que c'est quelque chose qui va se faire pas à pas, et les freins, j'en vois pas à partir du moment où nous, en tant que leader de ce collectif là, on est tellement convaincus, tellement engagés, et on le vit pleinement, enfin moi je sais pas faire autrement. Il y a une partie des personnes qui nous suivent naturellement et des personnes qui ne s'y retrouvent pas, et bien c'est pas grave et c'est ok. À partir du moment où on a défini cette mission, cette vision, on a défini ensemble les valeurs cardinales de notre collectif et des comportements qui s'associent, on est très clair sur vers où on veut nous emmener et donc qui veut nous suivre, nous suit.
L'importance de l'émotion et de l'expérience
J'ai lu que tu parles d'un changement qui n'avance que s'il est porté collectivement. Ça rejoint un peu ce que tu viens de m'expliquer. Mais il y a aussi ce changement qui n'avance que s'il est porté collectivement, mais aussi émotionnellement. C'est intéressant parce que ça rejoint ce dont j'ai parlé dans un autre épisode avec Regis Lemens, qui m'a parlé de l'importance des croyances, mais aussi une autre conversation que j'ai eue avec Jess Eva de 21 Grams, qui mentionne l'importance de la résonance de son propre vécu dans ce phénomène d'adhésion. Dans ton expérience spécifique, avec ce que tu viens de me raconter, qu'est-ce qui rend un comportement qu'on pourrait qualifier de responsable quelque chose qui va être désirable aux yeux des collaborateurs. Donc tu as parlé vraiment de cette cohérence, cet alignement, de savoir où tu veux aller, etc. Mais qu'est-ce qui fait que ça prend ou que ça prend pas ?
C'est une super bonne question et je suis convaincu, comme tu viens de le dire, que ça passe par les émotions et par l'expérience, par le vécu. Parce que c'est comme ça que chez moi j'ai eu ces déclencheurs. J'ai eu ces déclencheurs en me reconnectant au vivant et je me suis reconnecté au vivant par l'émotionnel et en remettant mes mains dans la terre, en réappréciant un insecte. Ça paraît simple et naïf mais les émotions c'est ça qui reste dans notre cerveau finalement. Quand on regarde rétroactivement, tout ce qu'on regarde en mémoire c'est des moments émotionnels de vécu. Et donc c'est vrai que, pour en revenir sur les maisons Dandoy, mon discours, c'était un premier levier, mais ce que je voulais absolument arriver à leur faire vivre, c'est des émotions que moi j'ai vécues en allant dans un champ. Il se fait qu'il y a deux semaines, tout pile, on a réussi à emmener les 80 collaborateurs fixes dans un champ. Il va y avoir un avant et un après en allant leur montrer de manière tangible et qu'ils le vivent. Pas les beaux discours, pas le Alexandre qui dit ça doit être un monde comme ça en plus déconnecté de leurs problématiques individuelles. Ils disent oui c'est très bien, t'as l'opportunité de pouvoir penser ça. J'ai dit ok, on va aller ensemble et vous allez aller voir et donc on a été à la ferme de Grange qui est un de nos fournisseurs de céréales et on a passé une journée fantastique sous le soleil où on a été planter des arbres ensemble, on a expliqué de l'agroécologie, on a été expliquer l'agriculture conventionnelle versus l'agriculture bio-régénérative etc. et on a terminé par une méditation en pleine conscience. Je peux t'assurer que je sens déjà maintenant qu'il y a un avant et un après. On a entendu des discours que je n'aurais jamais cru entendre de certains collaborateurs, des personnes plus jeunes qui ont commencé explicitement à expliquer pourquoi elles étaient fières de travailler à la maison en parlant des mots d'une entreprise responsable, écologique. Et donc ça va devenir petit à petit eux, nos ambassadeurs, Et ça, c'est génial. Et le plus beau là-dedans, c'est qu'en plus, l'organisation de cette journée, elle a été portée par les personnes dont je te parlais, Gabriella, notre personne de RSE, Vincent, etc. Et donc, du coup, moi, je deviens de moins en moins acteur de ça. Et là, je me dis, tiens, en quatre ans, quand on regarde l'environnement, on a fait un fameux chemin. Et donc je suis super curieux à l'idée de ce qui va se passer par la suite. Et c'est là, je trouve, que la force d'un projet, c'est quand on arrive à, du coup, avec ce fameux why, et d'avoir un qui est tellement bien clair et bien défini, que finalement, le collectif a envie de le balporter, peu importe le leader ou l'individu, et que cette histoire puisse continuer. Parce que dans ce fameux manifeste et dans le fameux récit que j'avais dû raconter à mes parents, c'était « Et si cette histoire pouvait continuer pour les 200 prochaines années ? » Et donc du coup, elle doit pouvoir exister même sans nous. Est-ce que c'est avec ou sans la famille ? On verra. Mais je trouve que là, en 5 ans, de ce que je vois, comment certaines personnes maintenant s'investissent et s'approprient cette histoire, je trouve ça fantastique et merveilleux.
Simplifier les choix et rendre les comportements accessibles
Ce que j'ai envie d'évoquer maintenant, tu parles de vraiment faire des sciences, quelque chose de concret pour embarquer les collaborateurs. Et j'ai envie de faire le parallèle avec les recherches de Melusine Bumfaller, qui est une anthropologue dont je trouve le travail passionnant, que j'avais d'ailleurs essayé d'avoir sur ce podcast. Et elle, en fait, elle parle de l'influence de la perception du temps et des ressources disponibles sur l'adoption des comportements durables. On va essayer d'éviter la surcharge mentale, le manque de temps, la complexité finalement, parce que c'est une forme de change management en fait. Quelque part, on est dans quelque chose de l'ordre de la transformation et donc il n'y a rien à faire. Il y a ces questions-là qui se posent parce que faire différemment pour les collaborateurs, ça veut dire quelque part donner de l'énergie en plus du temps et prendre de la charge mentale. Comment est-ce que vous faites chez Maison Dandoy pour traiter cette question, c'est-à-dire pour simplifier les choix, rendre ces nouveaux comportements plus accessibles sans les imposer ? Est-ce que vous posez cette question et comment vous travaillez ça ?
Je ne sais pas si on se la pose réellement, mais après je suis d'accord avec son analyse sur le temps et le fait qu'on ait déjà aujourd'hui, enfin je parlais avant, individuellement, je trouve qu'il y a une charge mentale écrasante et qu'on est de plus en plus surmenés et on voit qu'en fait finalement la société crée beaucoup de gens en porno et aujourd'hui malheureusement et comment du coup chez nous, chez Maisons Dandoy, on essaye d'aborder des sujets et bien c'est en revenant déjà avec cette vision qu'on a de revenir à une entreprise à visée régénérative et donc sur la visée régénérative Ça veut dire avoir un impact positif net sur son environnement, sur les gens, sur la société en règle générale. On y arrive si on prend soin des gens en interne aussi, tu vois, de l'environnement et des gens en interne. Et donc, on redescend, tu vois, en cascade, et sur comment est-ce qu'on prend aussi, c'est quoi le temps, tu vois, c'est quoi une semaine type dans la maison, ou après une semaine type, une année type. Antoine et moi, on essaie beaucoup de parler de régénération de l'humain. Il faut des moments sur une année où on se régénère. Moi, pareil, j'ai donné beaucoup, mais maintenant, pendant l'été, j'ai besoin d'un moment, d'un break où je vais me régénérer complètement. Donc ça passe par l'exemple de ces dirigeants aussi. Si je suis complètement, peut-être toute l'année, non-stop, et je vais envoyer des signaux comme ça au collectif, ça ne va pas aller. Donc il faut montrer qu'il y a des moments dedans. Et donc, je pense par l'exemplarité, et de nous, et de l'alignement de mon discours avec mes actes aussi. Il paraît important. De nouveau, s'il y a de la dissonance de ce côté-là, ça ne va pas aller. On est avantageux dans cette société Maison Dandoy où on a vraiment lutté pour rester indépendants financièrement. Et donc du coup, de se mettre son propre rythme, se mettre son propre tempo, Si on veut être là pour les 200 prochaines années, ce n'est pas un sprint, c'est un marathon. Et il faut accepter que dans son marathon, les comportements ne changent pas du jour au lendemain. Et on n'a pas la baguette magique. J'ai beaucoup de coachs avec qui on travaille, je fais partie du réseau de l'APM, on se pose toutes ces questions-là, je n'ai pas le pouvoir magique. Mon devoir à moi est d'être aligné, d'être connecté et de faire respecter un cadre qu'on a défini. Et de rester vraiment aligné avec la mission et la vision. Et le reste, il faut accepter que ça prenne parfois plus de temps. Et en fait, moi c'est plutôt un deal personnel en fait. Très sincèrement, parfois je suis tout le temps pressé, j'ai envie que les choses aillent plus vite. Et en fait, on m'invite et mon frère, c'est ça qui est intéressant dans la cogestion, à un rapport au temps qui est différent du mien et qui dit que c'est pas grave. Et on a fait ce qu'on pouvait dans le temps qu'on pouvait. Et en fait, c'est un problème pour qui ? C'est vrai, je veux dire, oui. Et donc, oui, et on voit là, je veux dire, tous ces petits éléments, tous ces petits signaux faibles, quand on les observe, je dis en fait, ok, petit à petit, on y avance, on avance. Et ça fait écho à une campagne qui va sortir bientôt, prochainement, fin août, début juillet, sur un biscuit à la fois, qui explique un peu tous nos processus de transformation interne et externe, sur quoi on travaille, les piliers vraiment de la maison. On va expliquer ça à nos clients. Je parle de nos clients cette fois-ci, mais on s'est dit, tiens, en fait, on va expliquer ça, rendre ça vocable de nouveau. Après avoir donné un peu ce manifeste, parce que le manifeste, de nouveau, il était d'abord, j'avais dit, en interne, sur des slides, il vivait, mais d'un point de vue externe, absolument pas. Et donc maintenant, on va expliquer sur quoi on travaille, et puis expliquer après avec le Saviez-vous ce qu'on... les résultats qu'on obtient et en fait expliquer les résultats positifs ou négatifs aussi. De nouveau, je pense que c'est important d'expliquer que dans tout ce chemin de transition, comme tu disais, qu'il faut prendre du temps, il faut expliquer les points qui sont difficiles, les points où on n'a pas de réponse, puisque forcément on va vers du nouveau et qu'aujourd'hui on doit réinventer. Alors moi je suis vachement ambitieux, mais en tout cas, Et on doit réinventer notre manière de fonctionner collectivement. On a atteint nos limites aujourd'hui. On a compris récemment qu'il y avait des limites planétaires. Comment on fait pour réinventer nos modèles qui nous font croire qu'on est dans une croissance infinie avec ces ressources finies ? C'est pour ça que j'adore ce concept de l'entreprise régénérative, qui vient en fait en dessous de l'économie du donuts, de Kate Raworth, qui a écrit la Donuts Economy, qui parle vraiment du plafond environnemental, qui sont symbolisés par ces neuf limites planétaires, et du plancher sociétal. Et donc voilà, en tant qu'entreprise, nous on doit réinventer ça. On voit que ça va prendre plus de temps au niveau du politique mais donc à notre niveau on peut faire déjà tellement de choses et du coup on peut montrer qu'en fait que c'est possible en tant qu'entreprise de à la fois s'intéresser aux enjeux sociétaux et environnementaux à condition qu'en effet on soit parrain financièrement et que la partie des profits du fameux 3P que nous avons remplacé par le biscuit en interne vive parce que sinon malheureusement le projet s'arrête.
Réflexions sur le temps et l'impact collectif
Et donc en fait, si je résume un peu ce que tu viens de dire, donc simplifier les choix, les rendre accessibles, c'est quelque part avoir dans cette vision, puisque vous êtes une société à visée régénérative, pour l'expliciter, donc c'est rendre plus que ce que l'on prend. Ça sous-entend qu'on ait aussi cette réflexion en termes de temps, de manière dont les choses doivent prendre le temps de percoler, de manière aussi de se dire qu'on n'est pas à flux tendu tout le temps et qu'on a le droit aussi de se régénérer comme ce qu'on essaye de pousser stratégiquement pour l'entreprise et que donc c'est ça qui est sans doute un élément positif aussi pour vos équipes pour pouvoir vraiment avoir le temps d'intégrer ce message que vous êtes aussi sensible et à l'écoute autant qu'il faut aux gens pour imprimer ce message. Ce qui est intéressant, c'est que tu viens un peu d'évoquer le sujet de ma question suivante, puisqu'on a pas mal parlé du coup de la culture d'entreprise que vous implémentez chaque jour, etc. Moi j'avais envie de parler de finalement des changements que vous observez au quotidien sur les collaborateurs mais aussi finalement sur la société, la société que ce soit la Maison Dandoy ou de façon plus globale sur la société en général.
Je pars de nouveau de ce que je vois dans la société en manière globale, c'était ce qu'on a commencé à faire avec ce manifeste, c'est de comprendre c'est quoi les grands signaux faibles actuels, c'est quoi les grands enjeux et quel est le la société dans laquelle on a envie de vivre demain. En partant de ça, actuellement, il y a quelque chose qui m'angoisse et qui me fait peur, c'est cette individualisation, ce retour à une pensée moins collective et très individualiste. Et la réponse qu'on peut offrir avec une société qui est un endroit collectif est d'entretenir des liens vitaux, importants, pour prendre soin, un peu comme dans une famille. Même si ce n'est pas une famille. Et parfois, on le vit dans l'entreprise, où des gens nous disent, oui, mais attends, vous faites des choses qui ne sont pas comme dans une famille. Bref, il peut y avoir des confusions sur ce qu'est une famille, ce qu'elle n'est pas, etc. Mais en même temps, je trouve qu'on... on doit prendre soin collectivement et on est garant nous en tant que géants de ce collectif et du bien commun d'aller ensemble. Et je pense sincèrement que les entreprises du coup, on est quand même au moins 38 heures par semaine ensemble, deviennent vraiment un des derniers lieux aujourd'hui du du commun, on doit faire du ensemble et c'est pour ça que les questions de télétravail etc c'est des sujets là pour l'instant sur lesquels je m'intéresse parce que je trouve que ça érode ce lien là et qu'il n'y a rien à faire tout ce que je viens d'expliquer d'avant de cette adhésion à cette vision, à cette mission Ok, ils l'ont lu sur les slides, mais ça va se vivre parce que tous les jours on est ensemble pour moi, l'un à côté de l'autre au bureau, qu'on va vivre des choses, que les personnes qui sont à côté de moi dans l'atelier sentent qu'on est là. Si je travaille dans le télétravail tout seul de chez moi, en quoi je suis crédible par rapport à tout ça ? Il y a de mon côté un besoin d'être garant de ce collectif et j'espère créer de l'adhésion pour certaines personnes, ça c'est certain. Et on essaie d'être dans la co-création de plus en plus et je me rends compte qu'il y a des personnes qui sont hyper à l'aise avec ça et qui adorent et qui sont preneuses d'autres personnes, de nouveau ça prend plus de temps. Quand d'un coup tu dis en fait t'es autonome, t'es responsable, tu choisis, tu connais le cadre et certaines personnes qui n'ont pas été accompagnées là-dedans, qui n'ont pas grandi là-dedans, qui n'ont pas été éduquées dans une société, il faut de nouveau, l'éducation en règle générale elle dicte plus qu'elle rend autonome, c'est perturbant. Mais ma manière à faire, enfin ma manière et la manière de faire de mon frère par rapport à notre éducation c'est, enfin, soyez des intrapreneurs et venez, soyez porteurs de solutions, soyez porteurs de... Cette entreprise elle est à vous comme à nous et donc on est intéressé par ces... Ces histoires d'entreprise, alors maintenant c'est plus tellement spécial, avant le terme c'était libéré, tu vois les cultures, qui avaient été par Isaac Geertz, qui en avait beaucoup parlé, mais ce genre de choses, il y avait quelqu'un qui était venu aussi à la PM nous parler des entreprises avec des mini-usines qui faisaient des pièces, je trouve ça fascinant et donc moi on amène ça aussi. Et tu vois que ça peut être un peu perturbant pour certaines personnes, mais petit à petit, à force, et en donnant confiance aussi. Et tout ça, notre Gabriela qui est en rage vient avec cette culture du feedback, une culture d'accompagnement là-dedans, et du coup d'essayer de faire grandir petit à petit les gens dans ces choses-là. En termes de culture d'entreprise, c'est ce qu'on essaie d'amener. Le jour où j'ai écouté Satish Kumar, je ne sais pas si tu vois qui c'est ce moine. Et il a dit des choses toujours très simples mais qui sont très fortes. Il a dit tiens, prenez soin de votre entreprise comme dans une maison. Faites que ce soit chaleureux, faites que ce soit, que ces bureaux soit comme dans votre maison, qu'on s'y sente bien, faites à manger ensemble. Prenez un moment, du temps pour faire ça. Prenez du temps comme vous le faites parce que c'est ce qui nous rend juste, en fait, On est des humains profondément humains qui avons besoin de ces relations. Et comme je disais, comme elles s'effritent, c'est important qu'elles soient dans l'entreprise, qu'elles soient là pleinement là.
Levier-clé pour embarquer les collaborateurs
Donc ça c'est les changements que tu observes toi à ton niveau dans la Maison Dandoy. C'est vraiment ce fait que tu vois que finalement ce phénomène de co-création peut advenir. On va revenir un petit peu au concret des choses et aussi pour les gens qui nous écoutent. Si tu devais maintenant partager ton levier-clé pour embarquer les collaborateurs, quand on est un communicant en interne ou un marketeer, par quoi est-ce qu'on devrait commencer pour embarquer les gens dans cette direction ? Quand tu regardes toi rétrospectivement sur ce que vous avez fait, par quoi commencer ?
Commencer par un alignement entre soi et ce qu'on fait, ça c'est clé, je pense. Quand je reviens, et c'est cet exercice que je me suis fait personnellement avec un coach pendant plusieurs mois, d'aller définir fondamentalement dans lequel j'ai envie de donner le reste de mon énergie pour vivre tout simplement. et donc pouvoir le mettre après au sein de l'entreprise et donc d'être aligné parce que si on n'est pas aligné, les gens le savent, le comprennent et donc du coup n'adhèrent pas. Et je pense que le fait de vivre pleinement et d'agir comme ce que je dis et en tout cas ce que je pense, c'est un des premiers leviers. Et puis après, une fois que ça c'est fait, je reviens avec cette histoire de bien bien bien s'assurer, je vois que dans beaucoup d'entreprises c'est pas assez clair, c'est cette mission, cette vision et les valeurs qui sont le cadre et le référent. Et si du coup on peut être aligné entre ça et ce qu'on fait, alors c'est magique. Et donc petit à petit, avec le temps comme on a dit, petit à petit l'entreprise avance et s'aligne vers ça parce qu'on le porte naturellement et quand on le porte naturellement ça ne peut faire qu'avancer et progresser.
C'est super intéressant parce que c'est vraiment tout ce que tu viens de me raconter là, c'est une mise en pratique concrète de tout ce que Jessica et Éva m'ont raconté dans un autre épisode, donc c'est vraiment cet alignement à soi-même, cette posture en fait finalement de leadership qui est vécue, c'est pas une question de force en fait, c'est une question vraiment de valeur qu'on vit au quotidien et puis de trouver son histoire et de pouvoir la raconter. Et de nouveau ça c'est finalement la base et le pouvoir, le grand pouvoir finalement des communicants. Je trouve que ça conclut extrêmement bien en fait cette série de podcast et cette question que je me suis posée d'activation du désir de faire autrement. Donc merci beaucoup pour ça. Si je te dis slow marketing, tu penses à quoi ?
Très honnêtement, je ne connaissais pas, mais par contre, ça me fait penser à... Nous, on a envie d'embarquer nos clients là-dedans. C'est intéressant, on vient de parler de comment on embarque d'abord notre collectif interne. Maintenant, nous avons envie d'embarquer nos clients dans cette aventure-là. On dit qu'on a x milliers de personnes, là, sur Bruxelles, qui viennent chez nous. Et je reviens avec un des points de notre manifeste, qui était d'avoir une plus large famille aura plus d'impact. Il faut qu'avec le slow marketing du coup, je crois comprendre que ça peut être ça, on vienne de manière de nouveau, pas contraignante, activer cette envie de s'engager avec nous. Et du coup, même chose, dans toi j'ai pas l'impression qu'on pratique le marketing, on raconte de manière authentique ce qu'on fait, ce qu'on est, qui on est. Et ce qu'on va essayer de tenter de faire là maintenant sur ce nouveau positionnement, je ne sais pas si c'est un nouveau, mais en tout cas, il y avait bien quelque chose qui était acquis chez nous, c'était la qualité, l'artisanat, un produit bien fait. Par contre, que c'est un produit engagé, je pense que les gens ne le savent pas encore, en grande majorité. Et qu'en plus, ils participent à tout ça. Et donc on n'a jamais vendu non plus quoi que ce soit, on n'a jamais parlé de promotion, on ne parle pas de trucs, on n'est pas venu acheter. Dans tout ce qu'on fait dans le marketing, c'est jamais de vendre, c'est plutôt un peu l'antipode parfois maintenant de ce que quand je regarde ce qu'on fait, on est tellement trop créatif que parfois on se comprend, les gens ne suivent plus. Et donc là, on va ramener un petit peu de désir, de comprendre et de partager ce qu'on découvre sur notre chemin à nous. Et on va lancer une thématique, donc après le ramuscu et la foile, par exemple, le Saviez-Vous. Et donc dans le Saviez-Vous, il y a un exemple d'un Saviez-Vous que je peux vous donner déjà en primeur, ça va être le Saviez-Vous concours après la Petra Bio Belge. Et c'est comme ça que j'imagine un peu, tu vois que je suis relié au slow marketing, mais c'est d'expliquer l'envers du décor, l'envers de nos problématiques, l'envers de connaître nos produits, connaître ce qui se passe derrière, connaître notre collectivité, connaître notre manière de penser, connaître toutes ces choses-là, qui peuvent faire adhérer à notre projet. Et de nouveau, notre projet, On revient, il n'est pas centré pour des actionnaires et s'enrichir. Il est pour qu'il soit là pour les 200 prochaines années et pour que cette culture patrimoine, cette maison, elle appartient au bruxellois, elle appartient au belge. Elle est là par miracle, presque 200 ans après, je ne sais pas pourquoi. Et on a envie que ça perdure. C'est ça que je dirais que le slow marketing me fait penser. En tout cas, il n'est pas là pour faire consommer à outrance. C'est ce que je dis tout le temps, ne venez pas chez nous tous les jours. Ce n'est pas bon pour la santé, c'est du sucre, c'est du beurre. En même temps, on est en train de réfléchir à c'est quoi les alternatives. Puis après, du bon beurre une fois de temps en temps, c'est très bon pour la santé, les bonnes graisses. Et puis après, un peu de sucre de temps en temps de nouveau, c'est être raisonné, c'est un petit peu... Pour moi, le slow marketing, c'est mettre en avant la qualité versus la quantité. En tout cas, il doit oeuvrer à ça.

